samedi 24 novembre 2012

Die 26150 : Présentation du Nucléaire et sa sortie avant la Chaîne humaine de ce Dimanche ( 1ère Partie)

Sortir des Energies fossiles est possible, en douceur…

Réunion importante ce samedi 25 novembre, puisque quelques 60 personnes avaient répondu à ce rendez-vous préparatoire à la Chaîne Humaine de dimanche 25 novembre. Après l’introduction de Mireille Verdet et Marc Isoard, de l’ Association Dioises de Transition Energétique,  Mr Philippe Méjean présentait le ‘Scénario NégaWatt’ (1) de sortie du Nucléaire et ‘l’Histoire du Nucléaire’ en France depuis 1945 (2).
Un futur énergétique durable selon négaWatt.
Le 24 novembre, l’association Dioise de Transition Energétique du Dioisa demandé à Philippe Méjean de présenter le scénario négaWatt,  scénario énergétique à l’horizon 2050. De quoi démontrer, selon ses défenseurs, la possibilité de sortir du nucléaire d’ici une vingtaine d’années.
Dérèglement climatique, épuisement des gisements de pétrole et de gaz, risque nucléaire… Pour répondre à l’urgence, négaWatt, une association d’ingénieurs, travaille depuis 2001 à l’élaboration d’un scénario énergétique alternatif. Objectif : apporter la preuve qu’il est possible de sortir du nucléaire, tout en respectant l’impératif d’une forte réduction des émissions de gaz à effet de serre. Révisé en 2006, ce scénario vient d’être refondu. Conclusion des experts : une baisse d’environ 65% de la demande énergétique est possible d’ici à 2050. Comment ? En combinant sobriété énergétique, efficacité énergétique et développement des énergies renouvelables.
À quoi sert le nucléaire ?
Le nucléaire sert à produire de l’électricité (80% de notre consommation électrique en France provient du nucléaire) mais l’électricité ne couvre que 22% de nos besoins énergétiques. Par ailleurs, seuls 33% de l’uranium consommé par l’industrie nucléaire sert in fine à produire de l’électricité.
« On parle sans cesse de production d’énergie, argumente Philippe Mejean. Mais jamais de la demande. Or, en prenant comme point de départ l’ensemble de la consommation énergétique française, puis en reconstituant à partir d’elle l’ensemble du réseau énergétique, jusqu’aux énergies primaires, on constate qu’il existe un gigantesque gisement dans la maîtrise de l’énergie, ce que nous appelons de manière imagée des ‘’négawatts’’. »
Comment agir ?
Selon l’association, le plus important filon de négawatts se trouve dans le secteur du bâtiment qui engouffre à lui seul 40% de nos besoins énergétiques. Ainsi, en 2050, on pourrait économiser 600 térawattheures (TWh) par rapport à la consommation actuelle, ce qui correspondrait à une baisse de 63% de la consommation. De même, les transports représenteraient un gisement de 400 TWh, soit une diminution de 67% de la consommation dans le secteur. Puis l’industrie, 200 TWh, soit 50% d’économie.
Pour tenir ces objectifs, deux impératifs : une révision complète de nos modes de vie et la mise en œuvre de politiques volontaristes. Ainsi, dans le bâtiment, il s’agira, côté sobriété, de stabiliser le nombre d’habitants par foyer (en baisse depuis cinquante ans selon l’Insee) et de réduire la surface moyenne par habitant. De quoi économiser 3 millions de logements d’ici à 2050. Et pour l’efficacité, de travailler sur l’isolation et l’optimisation des modes de chauffage. De même, l’objectif de réduction de la consommation dans les transports résultera d’une remise en cause de l’étalement urbain et du développement des transports en commun.
Côté énergies primaires, le scénario négaWatt table sur un décollage des énergies renouvelables. En particulier de la biomasse, avec comme première ressource le bois ; mais également du méthane issu, par exemple, des déjections d’élevage ou par synthèse chimique à partir du dioxyde de carbone émis par l’industrie. Sans oublier l’éolien, l’hydroélectrique et le photovoltaïque.
De quoi non seulement sortir du nucléaire en 2033, selon les auteurs de ce scénario. Mais également de réduire à peau de chagrin notre consommation de pétrole et de gaz. Et, ce faisant, mettre la France en cohérence avec l’objectif d’un réchauffement planétaire n’excédant pas 2°C. Soit le seuil critique à ne pas dépasser selon les experts climatiques.
Objectif crédible.
Pour Philippe Mejean, « notre scénario n’est fondé que sur des technologies existantes, nous sommes donc confiants sur ses aspects technologiques ». L’association négaWatt a  un chiffrage financier précis: « Nous estimons qu’en trente ans, il est possible d’économiser 750 milliards d’euros sur notre facture d’énergies fossiles. Sans compter le gisement d’emplois potentiels dans le solaire, l’éolien ou, bien sûr, le bâtiment. » Et d’ajouter : « Ne rien faire n’est pas une solution. » Pour autant, Thierry Salomon concède : « Il existe des incertitudes sur l’inertie du modèle actuel, et le type de gouvernance ou les systèmes de prise de décisions à mettre en place pour parvenir à nos objectifs. »
Le scénario négaWatt.
A la différence des réponses technologiques classiques et souvent binaires (pour ou contre le nucléaire par exemple), le scénario négaWatt propose une approche par la demande plutôt que par l'offre, à travers le concept de services énergétiques.
Il ne peut pas mieux tomber, le nouveau scénario négaWatt. Pour Philippe Mejean, le contexte post-Fukushima est favorable : ''Après cet accident, le tabou de la sortie du nucléaire en France a été levé. Et sur ces entrefaites, l'Allemagne a décidé de sortir totalement du nucléaire. Du coup, l'interrogation sur la faisabilité devient caduque : non seulement le scénario négaWatt 2011 est faisable, mais on a beaucoup plus de marge de manœuvre ''. Et si la sortie du nucléaire était une bonne nouvelle pour la France ? Car à travers le scénario négaWatt, c'est une nouvelle perspective sociétale qui s'exprime. En témoigne l'affluence étonnante qui entoure sa présentation publique à Die  ce 24 novembre 2012. Une rencontre qui dépasse les cercles de spécialistes et d'experts. Le scénario négaWatt, c'est un projet de société.
Remettre la question énergétique dans le bon sens.
Fondée en 2001, l'association négaWatt milite pour ''remettre la question énergétique dans le bon sens en partant des usages et non des ressources : c'est de nous chauffer, de nous éclairer ou de nous déplacer dont nous avons besoin, et non de bois, d'uranium ou de pétrole''. En incarnant l'énergie dans les besoins humains, négaWatt montre que les choix énergétiques ne sont pas que technologiques ou matériels : ils sont porteurs de valeurs.
La trilogie sobriété-efficacité-renouvelables fournit une triple réponse à la question de l'avenir énergétique. Elle présente l'originalité d'être au croisement de l'éthique et de la technologie. La sobriété interroge et les besoins et agit sur les comportements, à travers des mesures simples comme la réduction de la vitesse sur les routes ou le recours au co-voiturage. Elle consiste à privilégier les usages les plus utiles et restreindre les plus extravagants. L'efficacité consiste à agir par les choix techniques afin d'optimiser la quantité d'énergie nécessaire à satisfaire un service énergétique donné. Le recours aux énergies renouvelables, enfin, vise à augmenter la part de services énergétiques alimentés par les énergies les moins polluantes et les plus localisées.
Ingrédients de la transition énergétique.
Il y a d'autant plus urgence à opter pour une transition que les choix énergétiques relèvent du temps long : les infrastructures d'aujourd'hui pèseront longtemps sur les générations futures. Le CO2 libéré par la combustion des énergies fossiles pèsera sur le climat de demain, les déchets nucléaires et le démantèlement des centrales auront des coûts à long terme, et chaque goutte de pétrole consommée aujourd'hui nous rapproche de la pénurie. Le scénario négaWatt s'affirme soucieux de préserver le long terme. Fruit d'un travail collectif de plus d'une quinzaine d'experts, il réactualise le scénario antérieur (2006), qui avait inspiré certaines mesures du Grenelle, et porte sur l'horizon 2050. Il s'agit d'une approche multidimensionnelle, qui ne se résume pas à la lutte contre le changement climatique. Il y est aussi question de contraintes sur l'eau et les matières premières, d'usage des sols et de la biomasse pour l'alimentation et l'énergie.
Le modèle se fonde sur la prise en compte des besoins de services énergétiques dans trois secteurs principaux : la chaleur (chauffage des bâtiments, eau chaude sanitaire, cuisson des aliments, chaleur utilisée dans les process industriels) ; la mobilité (l'ensemble des déplacements des personnes, des matières premières et des biens) ; l'électricité spécifique (éclairage, électroménager, informatique, bureautique et moteurs électriques). Le scénario négaWatt analyse secteur par secteur les gains attendus de l'application d'une démarche de sobriété et d'efficacité. Les économies les plus importantes sont trouvées dans le bâtiment (résidentiel + tertiaire) : avec plus de 600 TWh d'économie en 2050 par rapport à une évolution tendancielle, il connaît une réduction de 63 % par rapport à 2010 (année de référence du scénario nW). Et ce malgré le contexte démographique projeté par l'INSEE et que le scénario nW prend en compte : 72,3 millions d'habitants en France en 2050, soit 7 millions de personnes supplémentaires dont les besoins seront à satisfaire.
2,2 fois moins d'énergie en 2050.
Dans les transports, le scénario nW prévoit une évolution des besoins de mobilité sous l'effet des politiques d'aménagement du territoire et de nouvelles pratiques sociales : généralisation des transports doux et des transports en commun, densification des espaces urbains, revitalisation des campagnes, télétravail, covoiturage, le scénario prévoit un gain d'environ 25% de kilomètres parcourus par personne en une année. Une meilleure efficacité des moteurs permet d'en diminuer la consommation unitaire de 55% d'ici à 2050. Quant au véhicule électrique, sa généralisation poserait d'importants problèmes de réseau électrique et de matières premières, il faut donc le réserver aux trajets courts en milieu urbain.
Dans le secteur industriel, le scénario prévoit une baisse de 10 % à 70 % sur les besoins en matériaux grâce à l'instauration de principes de « réparabilité » ou « recyclabilité » et intègre un gain moyen de 35% pour les moteurs électriques. Les énergies renouvelables dans ce secteur couvriront 30 % des besoins de chaleur basse température d'ici à 2050. L'agroalimentaire ne sera pas en reste et laissera plus de place à la biomasse et moins à la production de viande et d'élevage, dans un souci de rééquilibrage des surfaces disponibles et de souveraineté alimentaire.
Nouvelle gouvernance.
Au final, les Français ne consommeront pas moins, mais mieux, soulignent les promoteurs du scénario négaWatt 2011. Et les gains en énergie seront considérables : 54 % sur la chaleur, 59 % sur la mobilité, et 40% sur l'électricité spécifique. Il faudra donc fournir 2,2 fois moins d'énergie en 2050 que dans un scénario tendanciel. En conséquence, les besoins restants seront couverts à 90 % par les énergies renouvelables. Priorité à l'éolien avec une multiplication par 3,5 de la puissance installée d'ici à 2020 puis encore par 2 d'ici 2050 avec 17 500 machines installées en offshore en priorité. Quant au photovoltaïque, il pourra atteindre à terme 90 TWh par an, si une politique volontariste est instaurée. Au total, l'ensemble des filières renouvelables pourront fournir jusqu'à 990 TWh en 2050, sur un total de 1100 TWh de besoins en énergies primaires, soit 90 % des besoins. Infrastructures et réseaux devront être adaptés à cette grande mutation, avec des procédés de stockage innovants, comme la méthanation par électrolyse d'hydrogène combiné à du CO2, une nouveauté de ce scénario. Le tout permettra de se passer de nucléaire : le scénario prévoit l'arrêt du dernier réacteur du parc en 2033. Le recours temporaire à des centrales au gaz est proposé comme solution de transition, dans la limite de 70 TWh par an.
Pour changer la donne, la gouvernance de l'énergie devra aussi évoluer, souligne en conclusion le document de présentation. Principe constitutionnel d'accès à une source d'énergie sûre et à un prix acceptable, loi d'orientation pour la transition énergétique et Haute Autorité indépendante de l'énergie, du climat et de l'environnement forment les trois piliers de cette nouvelle gouvernance. Trois chantiers seront alors prioritaires : rendre le pouvoir aux territoires pour une gestion locale et citoyenne de l'énergie, faire de la transition énergétique l'affaire de tous, et repenser l'urbanisme, à la recherche d'un ''mieux vivre ensemble''. Environ 60 personnes écoutaient cette intervention à la Salle municipale Joseph Reynaud de Die, la vieille de la Chaîne Humaine de sortie du Nucléaire et pour les Alternatives énergétiques.
Claude Veyret

lundi 19 novembre 2012

La Transition contre la démesure...



La démesure existentielle de notre époque
De nos jours, la limite est souvent réduite à sa connotation péjorative d’obstacle ou de contrainte qui empêche l’épanouissement de l’individu « sans limites », qui veut et peut tout, héros de notre époque hypermoderne[1] Or, la limite est essentielle pour faire exister à la fois l’identité et l’altérité : Nous ne serions pas, chacun d’entre nous, des êtres singuliers si nous ne nous démarquions pas de ce qui n’est pas nous-mêmes en persévérant dans certains traits de notre singularité, forgés au cours de notre enfance et de notre parcours personnel, par nos rencontres et notre sensibilité propre… Simultanément, accepter notre condition d’être limité par une certaine singularité, c’est reconnaître qu’on ne peut pas se retrouver soi-même dans tout, partout, et donc qu’il existe d’autres singularités, des êtres différents avec lesquels coexister et participer à la vie.
La limite relie et sépare à la fois : Elle fait exister identité et altérité à travers la relation
Or, l’individu hypermoderne, nourri par le fantasme de toute-puissance véhiculé sans cesse dans les images et les discours de notre société marchande, est un hyper-excité du désir d’être, tiraillé par la crainte du manque ; il a besoin pour se sentir vivre de se consumer à travers les multiples activités qu’il entreprend et une connexion permanente aux réseaux de communication ; angoissé au repos, il est désemparé face au vide et à l’isolement que promet notre société à ceux qui ne suivent pas le « mouvement hyperactif » et le nouveau mode de sociabilité branché ; il a un fort besoin de fusion, de pulvériser son sentiment de solitude existentielle en s’immergeant dans le mouvement fou de l’univers néo-libéral…
Mais la fusion, à l’inverse de la limite, conduit simultanément à l’anéantissement de soi-même et de l’autre, et empêche l’ouverture à l’altérité et la relation. L’ego hypermoderne est un ego foncièrement accaparateur, qui a besoin de prendre et d’avoir sans cesse plus pour se sentir exister. Cette tendance à la démesure dans le désir « d’être en prenant » apparaît en réaction au manque « d’être en se liant » : La trop pauvre vie culturelle collective[2] et le déficit de pensée écosystémique[3] ne favorisent pas la sortie de la vision dominante de l’identité individualiste, fière de ne dépendre de rien et de s’auto-définir toute seule. Elle a pour conséquences la désastreuse standardisation du monde – les egos les plus puissants imposent leur ligne unique- et la disparition de la précieuse faculté d’écoute mutuelle.
Le manque de vie intérieure attise la démesure existentielle
Le grand paradoxe de l’individu hypermoderne est d’être à la fois gonflé d’un ego démesuré, qui a sans cesse besoin de consommer le monde en se consumant, et de se retrouver telle une coquille vide quand il n’y a plus rien à prendre ; à force d’être hors de lui-même pour prendre, il n’a pas cultivé de vie intérieure, cette sphère spirituelle, imaginative et sensible propre à chacun, fondamentale pour s’ancrer sereinement dans l’existence- face notamment à sa solitude existentielle, aux aléas douloureux de la vie… mais aussi pour jouir tout simplement avec sérénité du temps qui passe au quotidien. Et cette sérénité, selon moi, vient du sentiment intime d’être relié au monde, de faire partie des grands touts du Vivant et de la culture humaine.
L’héritage judéo-chrétien peut expliquer en partie cette tendance à l’intranquillité de l’âme occidentale avec l’idée qu’il véhicule que le bonheur et le Salut sont ailleurs, qu’il faut faire ses preuves et lutter pour y accéder dans l’au-delà ; de nos jours, c’est surtout l’idéologie capitaliste et sa logique « d’accumuler pour exister » qui pèse de tout son poids- des auteurs comme Max Weber ont fait le lien entre héritage judéo-chrétien et valeurs capitalistes.
Pour contrer cette démesure existentielle, autre versant de notre manque à être spirituel, il nous faut forger une nouvelle pensée qui donne toute sa place à la conscience de l’interrelation, de ce qui relie notre singularité aux altérités, naturelles et humaines, qui nous entourent. Cette conscience de l’interrelation ne va pas sans la conscience de limites.
Quelques échos dans l’Histoire à cette réflexion sur la limite
Pour les Grecs de l’Antiquité, la mesure est un principe d’harmonie qui permet à l’homme simultanément de trouver sa place dans le monde et d’agir avec éthique : trouver une place à la juste mesure du monde permet de bien agir, car l’éthique se règle sur l’ordre du monde, qui est intrinsèquement bon et beau. Le terme grec « cosmos », du mot grec (Κοσμος), traduit en français par « univers » ou « ordre », inclut l’idée du beau en évoquant l’idée d’un tout harmonieux- le français « cosmétique » en dérive d’ailleurs. Le fronton du temple d’Apollon à Delphes soulignait l’idée que l’homme a besoin de mesure pour connaître son identité, en exhibant ces deux formules : « Connais toi toi-même » et « Rien de trop ». Les Grecs ont développé toute une pensée sur la défiguration de l’humain et le pervertissement de la société par la démesure, hybris en grec. Nous en reparlerons souvent dans les prochains articles de la catégorie concernant les réactions dans l’histoire face à la démesure.
Dans l’étymologie latine, le terme latin religare désignant la religion a donné le français relier. L’idée de sacré qui marque la religion fait référence pour les Romains au scrupule, aux limites à respecter face à la transcendance divine. L’historien Georges Dumézil nous explique que le propre des créations lexicales, en grec et en latin, dérivées de cette notion de sacré est « d’opposer deux termes, comme sacer et sanctus en latin, ou hieros et hagios en grec (…), ce qui conduit à poser dans la préhistoire une notion à double face : positive, « ce qui est chargé de présence divine », et négative, « ce qui est interdit au contact de l’homme ». La notion de sacré inclut donc à la fois l’idée d’un respect radical de la limite et l’idée d’être relié, et fait référence à au double aspect de la limite qui est lien et séparation à la fois.
Alice Médigue
[1] Je vous renvoie au concept d’hypermodernité développé en psychosociologie (Nicole Aubert, Claudine Haroche, Alain Ehrenberg ou Gilles Lipovetsky notamment) pour désigner l’évolution de notre société occidentale depuis les années 1980, marquée par le temps du court terme et de l’urgence, la désagrégation du lien social, la fragilisation de l’individu en perte de repères durables… Le monde liquide, où le processus de marchandisation du monde dilue tous les repères de sens, décrit par le philosophe polono-britannique Zygmunt Bauman.
[2] Avec ses mythes, ses histoires, ses symboles, ses valeurs, ses saveurs et autres savoirs faire, elle alimente la conscience des individus de participer d’une même société.
[3] Conscience d’être relié à l’écosystéme naturel en tant qu’une de ses parties intégrantes ; recentrage de sa vision du monde autour de la sensation et de la compréhension des dynamiques de la vie qui nous traversent et nous relient aux autres êtres et éléments du Vivant.
Je m’appelle Alice Médigue, j’ai 27 ans, et depuis quelques années déjà, je butine entre mon implication au sein d’alternatives citoyennes, des temps de lectures/écriture et de création artistique, et ces moments indispensables de reconnexion au Vivant à travers la marche, le jardinage et l’initiation à la permaculture.
Ce butinage dans la diversité des dimensions de la vie, entre tête, coeur et mains, est mon moteur, ce qui me nourrit;  l’écriture est mon fil continu contre la dispersion, le hors-temps réflexif qui me rassemble; plus qu’un métier ou une activité spécifique, c’est une façon de vivre, une manière d’apprivoiser le temps qui passe et le chaos apparent du monde. Je ne suis vraiment à ma place que dans ce butinage et ses mises en lien, c’est sans doute pour cela que la permaculture me parle autant !
Choisir dès l’adolescence une « voie scolaire » entre divers cloisonnements (« enfer-mements » comme dirait Thomas d’Ansembourg) a été une torture ; après une licence d’Histoire et un service volontaire européen en Espagne qui m’a ouvert de nouveaux horizons, je me suis plongée dans l’histoire de l’Amérique latine (Master à l’IHEAL, d’où est né mon premier livre en 2008 Mémoires latino-américaines contre l’oppression. Témoignages d »exilés du Cône sud (1960-2000)), puis dans les sciences de l’éducation à Paris 8. En parallèle de cette vie étudiante, j’ai découvert les associations d’éducation populaire (notamment de chantiers internationaux comme Solidarités Jeunesses), les squats artistiques, les AMAP et autres réseaux citoyens qui oeuvrent à la réappropriation de nos espaces-temps de vies.
Ma participation à l’Université Populaire d’ATD Quart Monde a été un déclic essentiel qui a transformé mon rapport au savoir et à ce qu’est la culture d’une société, qui s’épanouit vraiment quand elle circule par et pour tous - pas la culture avec un grand Q ! comme dirait notre ami Franck Lepage; je poursuis aujourd’hui mon désir de la faire circuler là où sont les gens, jusqu’aux plus éloignés, à travers une bibliothèque de rue dans la Drôme – terre où je m’enracine désormais.
Je continue aujourd’hui le fil de mes réflexions, notamment à travers ce blog qui j’espère vous donnera de quoi butiner!
Pour m’écrire: alicemedigue@yahoo.fr

vendredi 16 novembre 2012

Nos rendez vous de la Transition en Biovallée de la Drôme...



1- Une conférence-débat sur "Que fait votre banque de votre argent?" organisée par l'Université Populaire du Val de Drôme, par Yann Louvel,
 le vendredi 23 novembre à 18h30 à la salle des Acacias à Crest. Plus d'informations sur cette soirée :
http://amisdelaterredrome.wordpress.com/2012/11/14/banques/1-

2- Chaîne humaine contre le Nucléaire et pour des alternatives énergétique locales à Die le 25 novembre 2012
Parcours proposé pour la chaîne: place de la République, puis rue de l'Armellerie, rue Camille Buffardel, Bd Adolphe Ferrier, Bd des Ursulines, Bd du Ballon, Bd du Cagnard, Place de l' Evêché, Place de la République.
Prochains CA : Lundi 19 Novembre 18 h 30,  chez Sylvie Reynaud
Engager la transition énergétique dans le Diois
« Heureux de constater la forte mobilisation du diois pour la châne humaine du 11/03/2012 qui réclamait la sortie du nucléaire, certains ont eu la bonne idée de créer une association qui ancre localement cette dynamique »explique Marc Isoard. L’association dioise pour la transition énergétique (ADTE) est donc née cet été. « Elle a pour objectif de favoriser la transition et l’émancipation énergétique dans le diois, en solidarité avec ses voisins ; de promouvoir et mettre en œuvre toute action en faveur de la sortie du nucléaire et d’une transition au Pétrole et dérivés des Gaz et huiles de Schistes,  par : la réduction massive de la consommation d’énergie et la mise en oeuvre de systèmes de production d’énergie renouvelable compatibles avec la sauvegarde de l’environnement naturel et climatique et soutenable sur le plan social et démocratique » précise Mireille Verdet. A ces fins elle se donne pour mission d’entreprendre les actes de sensibilisation, d’éducation,  de mobilisation citoyenne; d’expérimentation de projets utiles à un changement radical du système énergétique complète Sylvie Reynaud.
Dans la mesure du possible, les actions seront conduites en lien avec les réseaux nationaux, associations ou acteurs locaux agissant en ce sens.
L’association va organiser une  chaîne humaine permettant d’affirmer sans relâche la volonté de  s’émanciper du nucléaire et des énergies fossiles  et d’engager une véritable transition énergétique le dimanche 25 novembre 2012 à Die à 14h une chaîne locale  et participe ainsi à la préparation de la grande chaîne qui aura lieu le 09/03/2013 à Paris. Le samedi 24 novembre 2012, salle Joseph Reynaud à Die à 14h 30 aura lieu une projection suivie d’une réflexion pour agir au quotidien en faveur de la transition énergétique.
Contact : Association Dioise pour la Transition Energétique (ADTE)
Tel : 04 75 21 19 10 ;

3 - "Secrets des champs" : projection-débat
Jeudi 6 décembre, 20h30, cinéma EDEN à Crest
Les plantes cultivées ont un potentiel inouï. Pour nous nourrir, elles sont capables de mettre en œuvre des stratégies efficaces pour se développer, se nourrir et se défendre. Serons-nous à la hauteur de leur potentiel ?
Film réalisé par Honorine Perino, d’ADDOCS & Rés'OGM Info
Prix Libre 
; évènement s'intégrant dans le cycle (un film tous les 2 mois environ) de projection-débat entrant dans le thème de la Transition
organisé par le collectif Transition Val de Drôme
4 - La dett’scroquerie : conférence gesticulée
Samedi 8 décembre, 20h, au bar Sur les Quais, à Crest avec Désiré Prunier. Une conférence, même sur la dette, n'est pas synonyme d'ennui, surtout si elle est gesticulée.
Vous n’êtes pas convaincu ? Venez vérifier !
PRIX LIBRE

Qu’est ce qu’un territoire en Transition
Une ville ou une vallée  en transition est une ville ou une vallée dans laquelle se déroule une initiative de transition, c'est-à-dire un processus impliquant la communauté et visant à assurer la résilience (capacité à encaisser les crises économiques et/ou écologiques) de la ville face au double défi que représentent le pic pétrolier et le dérèglement climatique.
Ce processus a été développé en 2005 par les étudiants du cours de soutenabilité appliquée de l'université de Kinsale (Irlande) sous la direction de Rob Hopkins, formateur et enseignant en permaculture. La première mise en application a été initiée en 2006 dans la ville de Totnes au Royaume Uni. Depuis, le mouvement est devenu international et compte plus de 450 initiatives officielles.
L'originalité du mouvement des initiatives de transition tient en plusieurs points. Tout d'abord, la vision de l'avenir est résolument optimiste, et les crises sont vues comme des occasions de changer radicalement la société actuelle. La deuxième originalité est que le mouvement concerne la communauté dans son ensemble car c'est cette dernière qui doit porter le changement. L'action ne doit pas exclusivement venir des gestes individuels quotidiens, ni des instances politiques via la législation. C'est pourquoi le mouvement des initiatives de transition est apolitique et ne choisit pas les confrontations (manifestations, ...). Ensuite, le mouvement a développé une théorie psychologique inspirée de celle des traitements des dépendances toxicologiques pour tenter de traduire le désespoir ou le déni souvent consécutifs à la découverte du pic pétrolier et de notre dépendance au pétrole, en actions concrètes. Cette originalité semble à la source du succès que connaît le mouvement des villes en transition, mais elle suscite aussi des critiques, notamment sur le manque d'engagement politique.
La « transition énergétique » s'inscrit généralement dans une perspective d'économie circulaire et « écologiquement efficiente » (avec par exemple le recyclage complet des déchets, et l'usage d'écomatériaux) ;
La transition évoque souvent aussi une nouvelle forme du travail des métiers plus orientés vers l'utilité écologique et sociale et non sur la seule augmentation de la production.
La « transition énergétique » appelle aussi une transition vers une économie de la fonctionnalité.
Elle s'insère plus largement dans la « transition écologique et sociale » que certaines collectivités intègrent peu à peu comme objectif et nouveau modèle de développement (La Région Nord-Pas-de-Calais dispose ainsi d'une Commission « Transformation écologique et sociale », présidée par Jean-François Caron, qui peut notamment appuyer une transition énergétique sur des scénarii alternatifs produit par "Virage Énergie" avec comme enjeux « se préparer au pic pétrolier, se passer rapidement du nucléaire, lutter contre le dérèglement climatique ». La Région Île-de-France développe des actions de « conversion écologique ») ;
Jeremy Rifkin a théorisé dans les années 2000 le concept d'une 3ème révolution industrielle, bâtie sur 5 piliers qui nécessitent et permettent une transition énergétique, mais la voiture (électrique ou à hydrogène) reste un élément central de son système ;
Lester Brown propose une économie solaire (où l'énergie est d'origine photovoltaïque, éolienne, ou fournie par des moteurs à hydrogène, tout en développant le vélo…). Il propose un « plan B » (réduction de 80 % des émissions de gaz à effet de serre) ; via un nouveau modèle énergétique et une taxe carbone à mette en place entre 2010 et 2020, pour une « 3° transition énergétique » (la 1ère étant le passage du bois au charbon du XIX°, et la 2nde le passage du charbon au pétrole au XX°) ;
Serge Latouche va dans le même sens dans son traité de la décroissance sereine en proposant une a-croissance “solaire”.

mardi 13 novembre 2012

Reprendre "le temps"...

Stratégie pour « Sauvez le temps »  :
Recréer des rythmes collectifs autour de nouvelles richesses.
On ne pourra pas prendre collectivement le temps de réfléchir à de nouvelles richesses sans sortir de l’emprise du monde du travail actuel. Se libérer de la surcharge que le champ du « travail officiel » met sur nos vies est un préalable essentiel pour faire ce pas de côté – dans l’esprit de « on arrête, on réfléchit et c’est pas triste », fameux sous-titre de la bande dessinée de Gébé l’An 01 publiée en 1972).
La plupart des gens disent manquer de temps pour prendre du recul, s’informer, s’impliquer pour faire et vivre autrement. Il est certain que même celui qui dispose de plein de temps (le retraité, le décroissant qui travaille à temps très partiel…) a aussi le sentiment de courir souvent et de manquer de temps pour faire tout ce qu’il aimerait faire. Mais c’est aussi parce que, comme le montre très bien Hartmut Rosa dans son livre passionnant Accélération (Cf notes sur mon blog ici), nous en sommes tous réduits à gérer notre temps à « flux tendu » en maintenant ouvertes le plus d’options possibles pour l’avenir car nous ne savons plus très bien comment choisir, car nous sommes seuls : il manque des horizons de sens partagé pour choisir sans se perdre dans l’infinité des possibles, et des rythmes et temps collectifs pour ne pas être sans cesse en train de chercher à rester connecté, pour ne pas s’isoler.
Pour définir ensemble et socialiser massivement ces nouvelles valeurs /richesses, chacun doit pouvoir disposer de suffisamment de temps pour se les approprier et tisser autour des rythmes collectifs nouveaux, du local (dans son quartier, son village, autour du marché hebdomadaire, d’un jardin partagé, d’un café associatif…) au global (via le réseau international des Villes lentes, des Initiatives en transition…).
La lutte pour faire émerger de nouvelles richesses est étroitement liée à la lutte pour libérer notre temps de la centralité toute-puissante du travail, et par là aussi au combat des « chômeurs heureux » et autres précaires qui préfèrent assumer le statut de marginaux qu’on leur colle plutôt que de sacrifier leur précieux temps pour un job indigne à tout prix.
Et inversement : la lutte pour « sauvez le temps » de cette pression inédite de l’accélération, qui nous mine au quotidien, est étroitement liée à la lutte pour faire émerger de nouvelles valeurs et richesses, qui seront de nouveaux repères pour sortir individuellement et collectivement de la spirale de l’accélération.
C’est pour cela  que je propose dans cet article de relier ces trois champs de luttes : celui qui travaille à faire reconnaître de nouvelles richesses ( notamment le Collectif FAIR et le Collectif Richesses); celui qui fait une critique du travail (des Chômeurs Heureux et d’AC !, au collectif Krisis et son Manifeste contre le travail, en passant par les partisans de la réduction du temps de travail et du revenu minimum universel) ; et celui qui en appelle au ralentissement et qui crée ces déclinaisons pratiques (le mouvement international des Villes lentes, la Grande pause, la Slow Food…).
Je crois que ces trois champs de luttes auraient beaucoup à gagner à travailler davantage en synergie !
La lutte pour de nouvelles richesses
Cette lutte passe par la remise en cause du PIB en tant que mesure toute-puissante de la richesse des sociétés humaines. En effet, le PIB ignore ce qui ne fait pas partie du secteur marchand et, pire, il peut être négativement impacté (c’est-à-dire diminué) quand les richesses non marchandes se déploient (services publics gratuits, protection de la nature, liens humains, participation citoyenne, autonomie individuelle et collective – auto et co-production, autogestion…); et inversement, il peut être positivement impacté par des effets négatifs sur ces mêmes richesses : les méga-projets d’infrastructures (aéroports, autoroutes…) génèrent emplois, mobilités et profits qui font augmenter le PIB, tout en artificialisant des terres, en réduisant des territoires de vie et de liens sociaux à des No Man’s Land invivables et désertés; les nouvelles prisons construites par Bouygues et les techniques sécuritaires (notamment les caméras de vidéo surveillance en plein essor) génèrent un véritable business qui profite au PIB, provoquant dans le même temps une surenchère politique et médiatique du discours sécuritaire qui diffuse la méfiance entre les gens et affaiblit le lien social et la participation citoyenne… il y a des milliers d’exemples de cette incroyable capacité du néo-libéralisme actuel à créer de nouveaux problèmes (inutiles) pour simplement créer de nouveaux marchés qui font gonfler le PIB… au détriment de tout le reste.
Le PIB ignore donc ce que les économistes appellent « les externalités« ; si c’était le cas, la valeur du service rendu par le pétrolier par exemple serait diminuée du coût des réparations des dommages consécutifs à son naufrage (marée noire, intoxication, perte de biodiversité…). A travers le PIB, les comptes de la nation ne recensent que des flux (production, dépenses ou revenus courants) et non des stocks de richesse, et ignore ce qu’il advient des patrimoines naturels et immatériels.
Historique de cette lutte :
Créé après la Seconde Guerre mondiale dans la comptabilité nationale, le PIB est remis en cause dès les années 1970, par exemple, avec Nordhaus et Tobin (1973) et le Club de Rome (voir Meadows et al. 1972). Ce mouvement critique est initialement porté par le monde académique et associatif, mais il a ensuite gagné les grandes institutions comme l’ONU qui créé l’Indice de Développement Humain (IDH, plus englobant que le PIB) en 1990.
En 2007, l’OCDE a réuni un ambitieux Forum mondial sur le thème Comment mesurer et favoriser le progrès des sociétés, rapidement suivi d’une conférence internationale intitulée Au-delà du PIB : mesurer le progrès, la richesse authentique et le bien-être des nations, co-organisée par la Commission européenne, le Parlement européen, l’OCDE, le Club de Rome et le WWF.
Suivant cet élan, Nicolas Sarkozy a mis sur pied, en 2008, la Commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social, plus connue sous le nom de Commission Stiglitz,dirigée par trois économistes de renom (dont deux prix Nobel) : Joseph Stiglitz, Amarthya Sen, et Jean-Paul Fitoussi. Le rapport est rendu à l’été 2009 (disponible en ligne: http://www.stiglitz-sen-fitoussi.fr/fr/index.htm)
Extrait de ce rapport, p 20 : « La Commission estime que loin de clore le débat, son rapport ne fait que l’ouvrir (…), qu’un débat de fond sur les questions soulevées par son rapport et sur ses recommandations offrira une occasion importante d’aborder les valeurs sociétales auxquelles nous attachons du prix et de déterminer dans quelle mesure nous agissons réellement en faveur de ce qui importe ».
Un Forum pour d’Autres Indicateurs de Richesse(FAIR) est créé en 2008 pour assurer le suivi citoyen du travail de la commission Stiglitz; il émane d’académiques issus de disciplines diverses, de représentants syndicaux et de membres de la société civile.
Voici un extrait du Manifeste de FAIR (ici en intégralité: http://www.idies.org/public/fichiers%20joints/manifesteFAIR_pour_diffusion_02122008.pdf) de décembre 2008: “ Qu’est-ce que qu’une société « riche » ? Souhaitons-nous rester dans la posture schizophrénique du moment, qui est marquée par l’antinomie entre l’appel quasi consensuel à l’adoption de nouvelles pratiques de consommation (au nom de la lutte contre le « trop » effet de serre, et plus globalement du développement durable), et la perpétuation de références économiques totalement contradictoires avec les enjeux sociaux et environnementaux ? Sommes-nous prêts à admettre que le fait même « d’être en société » nous importe, et que la cohésion de cette société et l’équilibre des échanges en son sein constituent un bien commun qui a une valeur ? »
En septembre 2009, le Ministère de l’écologie (MEDDEM) met en place une commission de concertation chargée d’élaborer un tableau de bord d’IDD (Indicateurs de développement durable) et qui rassemble différents acteurs, avec entre autres la Fondation Nicolas Hulot, les Amis de la Terre, le WWF et les membres du collectif FAIR. Malgré des échanges intéressants et des avancées certaines, la commission a travaillé dans l’urgence et a manqué du temps long nécessaire à l’engagement d’un véritable processus participatif avec la société civile. A l’occasion de la conférence du 20 janvier 2010 portant sur les résultats de cette réflexion, le collectif FAIR insiste sur la nécessité de constituer « une commission permanente ouverte aux parties prenantes de la société civile pour continuer ce travail de façon plus approfondie et réellement participative » et de « compléter cette démarche en associant, autant que possible, aux indicateurs retenus, des objectifs et seuils d’alerte pour fixer les orientations et limites”.
Des pistes pour de nouveaux indicateurs
  • Le Produit Intérieur Doux (PID) a été imaginé en 1999 par le Carrefour des savoirs sur les finances publiques, au Québec. En 1997, lors d’un Parlement de la Rue, organisé pour débattre d’une réforme de l’aide sociale, le « Collectif pour un Québec sans pauvreté » propose à Bernard Landry, ministre des Finances, d’entrer en dialogue avec les personnes qui vivent en situation de pauvreté. Il accepte. Dans les semaines qui suivent, le Carrefour des Savoirs est constitué. Des rencontres ont eu lieu en 1998 et 1999, avec le ministre et les fonctionnaires qui préparent le budget du Québec. Au croisement de l’expertise des personnes qui connaissent la pauvreté, et de l’expertise de ceux qui connaissent la mécanique budgétaire et économique des finances publiques, de nouveaux concepts apparaissent qui expliquent ce qui est évident dans la vie des plus pauvres et qui est absent des outils comptables étatiques.Le PID est un outil de prise de conscience de ce qui est aujourd’hui comptabilisé dans le PIB (comme richesse d’une nation), et de ce qui compte pour chacun mais n’est pas compté dans le PIB. Le PID est un outil d’animation de débat public, à partir de la question : à quoi est-il important de donner de la valeur ? C’est pourquoi, le groupe a complété l’indicateur PIB d’un Produit intérieur doux (PID), qui prend en considération toutes les contributions, non monétaires, non monnayées et/ou non monnayables qui participent à la richesse humaine et collective. La mobilisation du collectif (rédaction d’une proposition de loi à partir des réflexions et suggestions de milliers de personnes, et l’appui de plus de 215 307 personnes et 1600 organisations) a été décisive pour l’obtention d’une loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 13 décembre 2002, elle demande au gouvernement d’agir pour faire du Québec d’ici 2013 l’une des nations industrialisées où il y a le moins de personnes pauvres. (www.produitinterieurdoux.org)
    En France, le Collectif Richesses relaie la démarche du PID. Constitué en 2001 en appui à la mission « Nouveaux facteurs de richesse » confiée à Patrick Viveret par la DIES – Délégation Interministérielle à l’Économie Solidaire -, il rassemble des personnes et associations actives dans les milieux de l’art, de la culture, de l’écologie, de la santé, de l’éducation populaire, de l’action humanitaire et de l’économie solidaire. Il a pour vocation de relayer, sous diverses formes, la mobilisation citoyenne pour l’affirmation d’un autre regard sur ce qui fait richesse dans nos sociétés. Voir ici le rapport « reconsidérer la richesse », réalisé par Patrick Viveret et présenté au public en mars 2002: http://www.collectif-richesses.org/spip.php?article4
    Une de ses propositions finales demande explicitement  “une politique audacieuse des temps sociaux” qui favoriserait les échanges citoyens et l’émergence de “comportements civiques, solidaires et écologiquement responsables. »
  • Le travail du Collectif FAIR
    Le collectif suit de près les avancées officielles en matière de nouveaux indicateurs de richesse. Voici un extrait de son communiqué à l’occasion de la présentation le 14 septembre 2009 à la Sorbonne du Rapport de la Commission Stiglitz (Cf. En intégralité: http://www.idies.org/index.php?post/Communique-de-FAIR) :
« Le collectif FAIR (Forum pour d’Autres Indicateurs de Richesse) salue la publication du rapport de la « Commission Stiglitz-Sen-Fitoussi » constituée à l’initiative du Président de la République Française. Dans l’ensemble, ce rapport donne un signal utile en ce qu’il remet en cause la domination excessive du PIB en tant qu’indicateur servant à guider la marche de la société. Nous considérons pour notre part que quelle que soit l’utilité statistique que peut avoir cet indicateur, il ne doit pas servir de référence à la décision politique car il ne fait aucune distinction entre les productions utiles et celles qui sont néfastes et il contribue de surcroit à occulter nombre d’écueils majeurs dont certaines destructions environnementales à l’origine de la crise écologique et des dérèglements climatiques auxquels est désormais exposée l’humanité toute entière. Il est salutaire que des économistes renommés mettent en exergue certaines déficiences de cet indicateur et expriment un point de vue critique sur l’objectif de croissance du PIB, lequel a fortement contribué durant plusieurs décennies à diriger nos sociétés vers le mur auquel nous nous heurtons maintenant.« 
En parallèle de ce travail de veille et de critique, FAIR participe à la création de nouveaux indicateurs en partant du principe suivant: la plupart des nouvelles richesses à valoriser ne sont pas quantifiables (l’amitié, la solidarité, le désir de participer et de prendre soin de notre patrimoine commun…) et nous devons progressivement sortir de cette logique qui tend à tout chiffrer et quantifier. Mais, en l’état actuel de l’emprise de la logique quantitative sur les politiques et les institutions officielles qui mesurent la richesse, nous sommes confrontés au fait que « tout ce qui n’est pas compté finit par ne plus compter »; c’est pourquoi FAIR s’efforce de contribuer à la création de nouveaux indicateurs qui ouvrent peu à peu des brèches pour penser d’autres formes de richesse, et notamment à travers le processus même de construction de ces indicateurs qui se veut participatif et souhaite être un vecteur de réappropriation citoyenne de cette question de “qu’est-ce qui compte pour nous?”.
Parmi les initiatives de création de nouveaux indicateurs, certaines concernent des indicateurs composites, parmi lesquels on peut citer l’IDH (indicateur de développement humain), l’IPH (indicateur de pauvreté humaine), l’ISS (l’indicateur de santé sociale) ou encore le Bip 40 (baromètres des inégalités et de la pauvreté); ils agrègent différentes variables et donnent ainsi une « vue d’ensemble », ou un « résumé » de la situation sociale. Le recours à des tableaux de bord, par exemple des inégalités, ou de la santé sociale sont utiles et constituent le socle d’indicateurs composites.
Voici quelques uns de ces nouveaux indicateurs:
Le Bip 40 (baromètre des inégalités et de la pauvreté) est un indicateur mis au point en France par un réseau associatif, de chercheurs militants et de syndicalistes. C’est un baromètre très riche, qui contient 60 variables, et qui permet de montrer que les inégalités et la pauvreté ne se limitent pas à des inégalités monétaires; il prend en compte les six dimensions d’inégalités suivantes : logement, santé, éducation, justice, travail et emplois et revenus. Cohabitent ainsi dans la même mesure synthétique des variables estimant l’évolution des sorties sans qualification du système éducatif, l’évolution du taux de surendettement des ménages, mais aussi du taux d’ISF (impôt sur la fortune), l’évolution des inégalités de salaire, de chômage etc. Le Bip 40 indique une forte progression des inégalités et de la pauvreté en France sur les vingt dernières années, avec de courtes périodes de répit notables, en particulier sur la période 1997-2000. La production de cet indicateur a été et demeure un moyen de nourrir les débats sur l’insoutenabilité sociale du paradigme de croissance dominant.
Dans le cadre de son projet « Indicateurs 21 », la Région Nord- Pas de Calais a organisé une conférence citoyenne composée de 15 citoyens sélectionnés par un organisme indépendant, qui ont rendu leur avis publiquement pour définir de nouveaux indicateurs de développement, complémentaires du PIB. Suite à d’autres réflexions issues de débats organisés autour de l’interprétation du baromètre avec des acteurs multiples (experts, spécialistes territoriaux sur les dimensions, associations, etc.), la Région a expérimenté un nouvel indicateur de santé sociale (ISS). Ce dernier prend en compte – outre l’accès raisonnable et équitable à la consommation, à l’éducation, à la possibilité de se loger et de travailler dignement – la capacité des individus à défendre leurs intérêts collectifs; et comme la “santé sociale” repose aussi sur les liens de fraternité et de solidarité, l’ISS incorpore deux variables inédites : les relations interindividuelles (interactions avec vos voisins et amis) et les relations sociales plus formalisées (mesurées par le nombre d’adhésions dans des associations).
Cet indicateur de santé socialepourrait être très nettement amélioré, et appliqué à toutes les régions françaises progressivement; il indique aujourd’hui qu’aucune corrélation n’unit les niveaux de santé sociale et les niveaux de richesse économique : les territoires les plus riches économiquement sont aussi classés parmi les plus « pauvres » à l’aune de cet indicateur. (Cf tableau dans l’article de Florence Jany-Catrice Des indicateurs composites de développement humain et de santé sociale : un enjeu de démocratie ?”, sur http://www.idies.org )
> Pour présenter les différentes pistes pour réguler et contrer le PIB, voici une synthèse de l’article « Au-delà du PIB : réconcilier ce qui compte et ce que l’on compte », d’Isabelle Cassiers et de Géraldine Thiry (décembre 2009, n°75 revue Regards économiques (publication de l’Université catholique de Louvain; http://sites.uclouvain.be/econ/Regards/Archives/RE075.pdf
Afin de pondérer le PIB par les externalités négatives qu’il ignore dans son calcul, divers indicateurs ont été développés. On peut les classer en trois catégories : indicateurs monétaires, indicateurs physiques ou indicateurs mixtes (composites ou tableaux de bord):
Les indicateurs monétaires partent du PIB et le corrigent ou le complètent pour tenir compte des atteintes au patrimoine. Deux modalités d’ajustement existent actuellement: les indices synthétiques et les comptes satellites:
  • Les indices synthétiques partent de catégories de la comptabilité nationale, en général la consommation finale, et en déduisent le coût estimé de diverses dégradations environnementales (pollution de l’air, de l’eau, sonore, déforestations, dommages résultant du CO2, etc.). C’est le principe appliqué par l’Indice de Bien-être Economique Durable (IBED) ou par l’Indice de Progrès Véritable (IPV).
  • Les comptes satellites, quant à eux, sont conçus comme des compléments (notamment environnementaux) à la comptabilité nationale. Le Comité d’experts des Nations Unies sur la comptabilité économique de l’environnement, créé en 2005, travaille à l’amélioration d’une telle norme comptable, dans l’espoir d’en faire une norme statistique internationale dès 2010. L’Epargne Nette Ajustée (ENA) se focalise non pas sur un PIB corrigé mais sur la création ou la destruction nette de richesse, entendue au sens large, c’est-à-dire incluant le capital naturel et humain, la soutenabilité étant définie comme la préservation de la richesse au sens large. Une ENA négative serait un signal de ponction dans les patrimoines ou d’endettement global, tout comme l’épargne négative (le recours à l’emprunt) d’un ménage lui signale qu’il vit au-dessus de ses moyens. Cet indicateur comporte toutefois des faiblesses. D’abord, que met-on dans la richesse au sens large ? Et qui en décide ? Ensuite, en monétisant des variations de patrimoines hétérogènes (naturel et intangible) et en les additionnant, l’ENA suppose qu’ils sont substituables, ce qui revient à s’inscrire dans une optique dite «de soutenabilité faible». L’ENA, comme tout indicateur monétaire portant sur les patrimoines, soulève aussi la question de l’arbitraire des prix : quel prix utiliser pour comptabiliser des patrimoines si la valorisation par le marché est imparfaite ou s’il n’existe pas de marché pour ceux-ci ?
C’est pour éviter de tels problèmes que certains auteurs ont d’emblée choisi un mode de valorisation des actifs qui ne passe pas par des prix de marché. C’est le cas des indicateurs physiques dont l’empreinte écologique (EE) est un bon exemple. Une troisième manière de prendre en compte les patrimoines est de les inclure dans des indicateurs mixtes qui associent des mesures monétaires et non monétaires sur différents champs : revenus, variations de patrimoines, chômage, inégalités etc. Cette association peut se faire de manière liante, par un jeu de pondérations, au sein d’un indice composite unique (tel l’Indice de Bien-être Economique, IBEE) ou de manière plus souple, dans un tableau de bord.
Il faudrait associer à la prise en compte des inégalités de revenus et de pouvoir d’achat une évaluation des inégalités d’accès aux sources de qualité de vie au senslarge, que l’Indicateur de Développement Humain ne fait pour l’instant pas. Toutefois, que les inégalités d’accès à ces résultats n’apparaissent pas dans l’IDH est symptomatique des nombreuses difficultés méthodologiques qui subsistent dans l’opérationnalisation de ces questions.
Il est surprenant de lire en introduction du Rapport Stiglitz (p. 19) que «l’évaluation de la soutenabilité est complémentaire de la question du bien-être actuel ou de la performance économique et doit donc être examinée séparément. (…) Lorsque l’on conduit une voiture, un compteur qui agrégerait en une seule valeur la vitesse actuelle du véhicule et le niveau d’essence restant ne serait d’aucune aide au conducteur ». Nous pensons au contraire qu’il importe à l’automobiliste de connaître l’effet de sa vitesse sur sa réserve d’essence, car il existe une vitesse optimale qui lui permet de maximiser la distance parcourue, à quantité de carburant donnée. En outre, la parabole est incomplète. S’il est bien sous entendu que la jauge indique l’état de nos patrimoines et que le compteur de vitesse rend compte de la croissance économique, il manque dans cette analogie un troisième instrument : la boussole ou le GPS, qui informerait de la direction prise, de l’orientation du «progrès» des sociétés. Selon une expression prêtée à Gandhi, «speed is irrelevant when you are moving in the wrong direction»
Est-il pertinent de partir du PIB pour le compléter (comptes satellites, indices composites) ou le corriger (indices synthétiques) si celui-ci est construit sur des bases qui ne peuvent pas rendre compte des priorités de l’heure ? S’il est vrai que ce que l’on compte oriente notre action, et si l’orientation des décennies passées pose aujourd’hui problème, ne faut-il pas revoir les comptes à leur racine ?
Les luttes des chômeurs et des précaires
La centralité excessive du travail
En un siècle, la durée de travail annuelle par actif occupé a été quasiment divisée par deux, passant de 2900 heures à la fin du 19e à 1600 heures à la fin du 20e. Mais l’intensification du travail avec l’augmentation des cadences et des exigences de productivité a créé dans le même temps un sentiment de surcharge de travail, tandis que les impératifs du travail (la liste de choses à régler qui s’accumulent constamment) ont tendance à pénètrer le temps libre et à réduire la possibilité d’en jouir pleinement.
La centralité du travail – comme facteur de définition des identités et de régulation des temps sociaux- est particulièrement forte en France. Dans l’Union Européenne, les Français sont ceux qui accordent le plus d’importance au travail: 70% le jugent comme « très important », contre 40% des Danois ou Britanniques, selon le « European Value Survey » de 1999; 65% des Français souhaitent que le travail occupe moins de place dans leur vie, contre 20% des Portugais, et un quart Italiens et Finlandais. Selon le « European Social Survey » de 2002, 28% des Français estiment que leur emploi les empêche « toujours » ou « souvent » de consacrer le temps qu’ils souhaiteraient à leur famille: c’est le taux le plus élevé en Europe.
Selon l’enquête de l’INSEE de 2003 « Histoire de vie et construction des identités »: « Finalement, seuls 16% de la population considèrent le travail comme important et sont en même temps satisfaits de leur emploi: il s’agit surtout de cadres, de personnes sans enfant et d’indépendants. A l’autre extrémité, 40% le considèrent comme peu important et sont insatisfaits de leur travail: cela concerne surtout des ouvriers, des employés et des femmes avec enfants« (Le travail, non merci ! Camille Dorval, Les petits matins, 2011.p 121).
En 1981, Dominique Schnapper publie son étude « L’épreuve du chômage » et distingue trois profils type d’expériences du chômage: le « chômage total » (humiliation, ennui, désocialisation; les personnes n’attendent qu’une chose: retrouver un emploi); c’est l’état que vivent la plupart des chômeurs, qui sont aussi ceux qui valorisent le plus le travail en réaction à l’expérience destructurante qu’ils vivent hors du travail. Le « chômage différé » concerne surtout les cadres qui prennent ce temps comme temps de formation, de mûrissement de nouveaux projets, de rebond; le « chômage inversé » concerne quant à lui notamment les jeunes employés, les femmes, les « rentiers provisoires » (période de vacances provisoire) et les « artistes » (activité créatrice). Dans ces deux derniers cas, la période de chômage est donc mise à profit, c’est une période extrêmement active de loisirs ou de créativité ».
Depuis la fin des années 1980, et surtout dans les années 1990, ont émergé des mouvements de chômeurs qui s’élèvent contre la culpabilisation que la société du “culte du travail” veut leur faire endosser, tout en faisant une critique de la centralité du travail dans nos sociétés.
Voici cinq initiatives qui montrent bien le retournement de valeurs auquel appellent ces mouvements:
- Le Manifeste des Chômeurs heureux
Rédigé et diffusé à Berlin en 1996, ce manifeste est puissant de lucidité et refuse de donner une once de prise à la bonne morale qui culpabilise les chômeurs au lieu d’analyser et de critiquer les fondements d’un système économique qui a besoin du chômage pour prospérer.
Voici un extrait de ce manifeste, qui fait bien le lien entre la lutte pour libérer le temps et la lutte pour créer de nouvelles richesses:
Si le chômeur est malheureux, c’est aussi parce que le travail est la seule valeur sociale qu’il connaisse. Il n’a plus rien à faire, il s’ennuie, il ne connait plus personne, parce que le travail est souvent le seul lien social disponible. La chose vaut aussi pour les retraités d’ailleurs. Il est bien clair que la cause d’une telle misère existentielle est à chercher dans le travail, et non dans le chômage en lui-même. Même lorsqu’il ne fait rien de spécial, le Chômeur Heureux crée de nouvelles valeurs sociales. Il développe des contacts avec tout un tas de gens sympathiques. Il est même prêt à animer des stages de resocialisation pour travailleurs licenciés.
Car tous les chômeurs disposent en tout cas d’une chose inestimable : du temps. Voilà qui pourrait constituer une chance historique, la possibilité de mener une vie pleine de sens, de joie et de raison. On peut définir notre but comme une reconquête du temps. Nous sommes donc tout sauf inactifs, alors que la soi-disant « population active » ne peut qu’obéir passivement au destin et aux ordres de ses supérieurs hiérar-chiques. Et c’est bien parce que nous sommes actifs que nous n’avons pas le temps de travailler.”
En lire des extraits sur cette page de mon blog: ici
- Le Manifeste contre le travail
En 1999, le groupe allemand Krisis crée en 1986, décide pour la première fois de synthétiser ses réflexions théoriques en rupture avec les marxismes dans un livre à large diffusion intitulé « Manifeste contre le travail ». Ses auteurs (avec entres autres: Norbert Trenkle, Robert Kurz et Ernst Lohoff) font partie de la mouvance internationale que l’on appelle en Allemagne la « wertkritik » (critique de la valeur), où l’on retrouve des auteurs comme Moishe Postone, Anselm Jappe, Roswitha Scholz, Claus Peter Orlieb, Franz Schandl, Gérard Briche, etc., mais aussi des groupes comme Principia Dialectica (Londres), Critica Radical (Brésil), Krisis (Allemagne), Chicago Political Workshop (Etats-Unis), Exit (Allemagne), Streifzüge (Autriche), Groupe 180°… Cette « wertkritik » vise « une réinterprétation de la théorie critique de Marx » comme l’a appelée Postone; après le Manifeste du parti communiste, après ce qui tient lieu de manifeste situationniste avec  » De la misère en milieu étudiant « , cette mouvance trouve dans le « Manifeste contre le travail » son texte phare, en soutenant qu’il ne faut pas libérer le travail du capital comme le pensent depuis le 19e siècle la gauche, l’extrême-gauche et une large frange de l’anarchisme, mais se libérer carrément du travail. André Gorz en France appréciait les réflexions de ce groupe. On peut retrouver une présentation plus approfondie de ce courant au public français dans le livre d’Anselm Jappe, Les Aventures de la marchandise. Pour une nouvelle critique de la valeur (Denoël, 2003) ou dans Moishe Postone, Temps, travail et domination sociale (Mille et une nuits, 2009).
En lire des extraits sur cette page de mon blog : ici
- AC ! Réseau – Agir contre le chômage et la précarité
AC ! – Agir ensemble contre le Chômage et la précarité – est un réseau de collectifs locaux, un mouvement rassemblant chômeurs et chômeuses, précaires, salarié-e-s et organisations solidaires en lutte contre le chômage et contre la précarisation de l’ensemble de la société.
AC ! s’est constitué autour d’un appel lancé en octobre 1993par des syndicalistes, des militant-e-s associatifs et des chercheurs, pour en finir avec le chômage, pour lutter contre la résignation, pour une autre répartition du temps de travail et des richesses.
Par les « marches contre le chômage » qui durant plusieurs semaines, au printemps 1994, sillonnèrent la France (plus de 30 000 personnes à l’arrivée, à Paris), par ses initiatives lors des « Marches Européennes  » qui sillonnèrent l’Europe (plus de 50 000 personnes à l’arrivée à Amsterdam en juin 1997, autant à Cologne en mai 1999 lors du Sommet Européen), par ses manifestations nationales contre la réforme de l’assurance-chômage en mars 1996, par le mouvement d’occupations (hiver 1997/98), par ses actions symboliques (occupations, réquisitions d’emplois, de nourriture), AC ! s’est fait un nom.
«Victimes de la précarisation du travail et de la vie, nous refusons la culpabilisation.
Ni marchandises à la disposition du patronat, ni voués à la soupe populaire, nous sommes des individus différenciés, avec nos projets et nos désirs.
AC ! se prononce pour un réel partage du temps de travail avec la création de nouveaux emplois stables et socialement utiles, pour un renouveau des services publics et s’associe aux luttes contre les licenciements.
AC ! n’accepte pas que la France, un des pays les plus riches au monde, laisse de côté un quart de la population contrainte à mendier auprès des services sociaux. Si la société ne peut ou ne veut donner du travail, alors qu’elle donne la possibilité de vivre. Nous affirmons qu’avec ou sans emploi, chacun-e doit pouvoir bénéficier d’un revenu au moins équivalent au SMIC mensuel afin de satisfaire ses besoins sociaux fondamentaux : se nourrir, se loger, se soigner, s’éduquer, se déplacer, se divertir.
Nous agissons pour :
La réduction massive du temps de travail : 32 h tout de suite, sans baisse de pouvoir d’achat, sans flexibilité ni précarisation ; Un revenu décent, individuel, pour toutes et tous : aucune allocation, aucun revenu en dessous du SMIC ; La reconnaissance des organisations de chômeurs et de précaires partout où se décide leur sort (Assédic, ANPE, CAF …). »
- Le Collectif de résistance au Travail Obligatoire (RTO), créé en 2005, agit aussi pour solidariser les chômeurs entre eux et faire de la lutte contre l’étiquetage et la culpabilisation un combat collectif. L’article (du 4 octobre 2005) ironique qui annonce leur création donne bien le ton:
L’année dernière pas une semaine sans nouvelles de ces dangereux précaires et chômeurs qui occupaient sans discernement, non seulement l’entreprise de Laurence Parisot ou les Assedic, mais aussi toutes ces utiles associations et institutions qui réeduquent utilement tous ces demandeurs d’emploi qui n’arrivent toujours pas à se lever le matin.
Ces précaires rendus agressifs par la misère ( et disons le franchement par des théories absurdes sur la lutte des classes ) n’hésitaient pas à s’en prendre aux entreprises d’insertion ou de valeureux patrons sociaux donnent du boulot approprié aux exclus ( nettoyage, bâtiment, restauration ..), en exigeant en échange de l’argent public.
Ils multipliaient les actions contre la politique d’insertion de la Mairie de Paris, qui pourtant montrait son intérêt pour les Rmistes en les convoquant massivement pour leur proposer de motivants contrats d’avenir, 35h payées 26, en n’hésitant pas à subventionner des entreprises d’intérim pour leur trouver des emplois stables.
C’est évidemment avec un soulagement certain qu’élus, travailleurs sociaux et entrepreneurs citoyens voient leurs messages se raréfier depuis septembre. Certains , allant un peu vite en besogne les pensaient enfin convertis au joies du CNE ou retournés à des formes de militantisme plus raisonnables ( collectifs pour le non , CGT privés d’emploi, Fondation Copernic par exemple).
Malheureusement, il semble que dans l’ombre, ces dangereux individus fomentaient en fait de nouveaux complots contre l’emploi : ces cas sociaux incurables ont désormais leur site (www.collectif-rto.org) ou ces faibles d’esprit que sont la majorité des précaires peuvent consulter leurs textes et qui sait en venir à refuser un CI-RMA ou monter une occupation collective dès qu’une radiation destinée à les ramener à la raison leur coupe momentanément tout revenu pour leur apprendre à vivre.
Et s’ils n’étaient que sur internet ! Déjà certains témoignages concordants d’élus de la mairie de Paris et d’associations d’insertion signalaient des prises à parti publiques, dont ils sont coutumiers, les lâches , lors de manifestations ou tout militant de bon sens se contente de marcher tranquillement d’un point à un autre.
Début septembre, l’inser-asaf, association d’insertion ayant pignon sur rue (inaugurée par la camarade Francine Bavay) se plaignait d’une occupation de leurs locaux, concernant un rmiste sdf qui avait le culot de réclamer un logement avant d’aller bosser. Apparemment ils avaient reçu l’appui d’autres chômeurs venus d’autres départements, ces mêmes chômeurs qui pleurnichent dès qu’on leur impose de déménager pour aller faire maçon ou cuisinier à 600 bornes de chez eux
De source sûre, une vingtaine de ces gueux s’en sont ce week-end pris à la culture, n’hésitant pas à troubler, ces barbares, ces ignares, plusieurs attractions de la Nuit Blanche : uniquement préoccupés de leur nombril, ils réclamaient que le budget de la Nuit Blanche, de Paris Plage et plus généralement du grand spectacle culturel parisien soit reversé aux les pauvres. Ces égoistes, anti-patriotes probablement subventionnés par Londres, ont été jusqu’à se réjouir publiquement de l’échec de notre candidature aux Jeux Olympiques.
La majorité de nos citoyens tournés vers l’avenir, pleinement participants à notre société aux valeurs renouvelées grâce à notre gouvernement et à son opposition responsable, ne peuvent laisser impunément des gens qui voudraient nous conduire au chaos en défendant la gratuité, l’activité libre et choisie et la fin de toutes les mesures de contrôle des chômeurs, continuer leurs provocations. Ils poussent l’arrogance jusqu’à faire des réunions publiques tous les jeudis à 18h au 23, bis rue Mathis, métro Crimée .
Nous qui payons leur RMI avec nos impôts, ne les laissons pas se rire de nous en profitant de l’assistance financière que nous leur accordons pour faire ce que l’on peut qualifier sans exagération du terrorisme social. Rendez -vous dès ce jeudi pour leur donner une bonne leçon ! Des citoyens outrés et évidemment anonymes.”
- La première grève des chômeurs et des précaires, le 3 mai 2010. Plusieurs collectifs de demandeurs d’emploi et de précaires ont manifesté le 3 mai 2010 dans une dizaine de villes de France (Rennes, Nantes, Tours, Montpellier, Lille…). A Paris, des manifestants ont envahi le siège de Pôle emploi, munis de pancartes « Bienvenue à Police emploi » ou « Plutôt chômeur que manager! ».
Lire ici en ligne : Appel de la coordination des collectifs de chômeurs et précaires :http://www.ac.eu.org/spip.php?article2071
La réduction du temps de travail
Le bilan des 35 heures est loin d’être la catastrophe dont parlent ses détracteurs: il a tout d’abord permis la création nette d’environ 350 000 emplois; selon l’enquête « RTT et modes de vie » de la Dares fin 2000 et début 2001: 59% des salariés estiment que le passage à la RTT a eu un effet positif sur leurs conditions de vie; un tiers pense qu’il a permis une meilleure conciliation entre la vie professionnelle et familiale, les activités s’étant le plus épanouies concernant le champ des nouvelles richesses: le lien aux enfants, le repos, le bricolage et les découvertes et sorties culturelles.
L’échec relatif des 35 heures est surtout dû à l’intensification du travail et à la flexibilisation des horaires dont ont profité les employeurs qui n’ont pas joué le jeu; en effet, environ un tiers des entreprises industrielles ont eu recours à des accords de modulation lors de la mise en place de la RTT, qui ont permis de varier les horaires d’une semaine à l’autre.48 % salariés estiment ainsi qu’on exige d’eux une polyvalence accrue depuis la RTT, et 42% disent avoir moins de temps pour exécuter les mêmes tâches, tandis que 32% se sentent plus stressés qu’avant. L’erreur fatale des politiques est de ne pas avoir accompagné les 35 heures de règles sur les conditions de travail, qui auraient notamment empêché cette surenchère à la flexibilisation et à l’intensification du travail.
Alors qu’il y a quatre millions de chômeurs en France, et 19 millions d’actifs à temps plein qui travaillent en moyenne 39,4 heures par semaine, un mouvement général vers la semaine de quatre jours (32 heures) permettrait, selon une étude du Ministère du travail, de créer 1,6 millions d’emplois en CDI. Les SCOP sont les premières entreprises à avoir impulsé la réduction du temps de travail; aujourd’hui, 400 entreprises en France sont passées à la semaine 4 jours, en créant 10 à 15% d’emplois nouveaux en CDI sans augmenter leur coût de production et sans baisser les salaires. Ces entreprises pionnières sont diverses, de l’antenne Mami Nova de Brest ou Fleury Michon, à des centaines de PME (auto-école à Rouen, un fabricant de logiciels à Chambéry, un charpentier près de Bordeaux, l’association Peuples solidaires…). L’Etat pourrait très bien encourager par des mesures d’exonérations fiscales cette transition véritablement efficace pour faire disparaître le chômage : outre la création de milliers d’emplois au sein des entreprises existantes, cette transition pourrait faire émerger de nouveaux emplois autour du temps libre, dans le secteur culturel ou sportif par exemple; sans compter, ceux, par milliers, qui pourront être créés dans les champs de l’agriculture agroécologique, des technologies appropriées, du recyclage, des énergies renouvelables ou du démantèlement des centrales nucléaires…
Les partisans du Revenu minimum universel (RMU)
Dès le milieu du 20e siècle, l’économiste anglais James Meade, lauréat du prix Nobel de l’économie, soutient l’idée d’un revenu d’existence qui serait attribué à tout homme « parce qu’il existe et non pour exister« . Il propose le « dividende social” qui consisterait à redistribuer la moitié des dividendes versés par les entreprises à leurs propriétaires.
Selon le philosophe et économiste belge Philippe Van Parijs, l’efficacité croissante des moyens de production restreint la quantité de travail humain nécessaire; il est donc normal que l’on travaille moins. Les ressources naturelles étant limitées, chacun doit avoir droit à une part égale de ces ressources; la traduction monétaire de ce partage équitable se fait via l’allocation universelle.
L’économiste Baptiste Mylondo expose dans son livre Un revenu pour tous. Précis d’utopie réaliste (Utopia, 2010) comment il serait possible de verser à chaque individu un revenu minimum (à hauteur de 750 euros par adulte et 250 euros par enfant mineur). Cela coûterait au total 380 Milliards d’euros par an (pour se donner une idée: le budget annuel total de l’Etat aujourd’hui: environ 285 M). Le financement se ferait ainsi:
- Pour un tiers (121 M): par les transferts de la protection sociale et de l’Etat : suppression des allocations non contributives (48 M) + transfert du budget de la protection sociale (hors prestation de santé directe) (73 M). Seraient concernés: allocations familiales, logement, minima sociaux, les bourses scolaires, et la politique de l’emploi – contrats aidés, exonérations de cotisations…- qui ne seraient plus nécessaires avec la disparition du chômage). Mais cela ne toucherait pas les prestations assurantielles liées à une certaine durée de cotisations type allocations chômage ou pensions de retraite.
- Les 2/3 restant (environ 260 M): augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) d’environ 35 points pour atteindre un taux d’imposition moyen de 47% si on additionne CSG et contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) + plus grande progressivité de l’impôt sur le revenu (ceux qui sont les plus précaires actuellement payeront moins d’impôts qu’actuellement, tandis que les plus riches en paieront plus).
Or, aujourd’hui la CSG et la CRDS rapportent 90 M, et l’impôt sur le revenu seulement 50 M. Certains critiques de l’allocation universelle proposée par B. Mylondo pensent que leur augmentation importante risquerait de faire fuir de nombreux contribuables aisés. Mais son avantage essentiel est d’être réellement universel et de rompre avec la “religion du travail” et les jugements moraux qui l’accompagnent; ce qu’il apporte de révolutionnaire, c’est le temps et la disponibilité d’esprit ainsi libérés par la sécurité de recevoir chaque mois de quoi vivre décemment, sans plus se culpabiliser parce que c’est devenu un choix reconnu (tout le monde a droit à ce revenu; ceux qui le refusent ont choisi d’utiliser leur temps sur le marché du travail tel qu’il est actuellement, plutôt que d’utiliser leur temps à autre chose, dans un autre champ créatif hors de ce marché). Et ce temps et cette disponibilité libérés sont infiniment précieux pour penser collectivement ces nouvelles richesses et valeurs de société que nous essayons de faire émerger
D’autres propositions (Yoland Bresson, Philippe Van parijs, Chantal Euzéby) tablent plutôt sur un revenu de 467 Euros par mois (comme le montant du RSA socle); mais la faiblesse de ce revenu obligerait à travailler pour le compléter, entrainant des risques de précarisation du marché du travail (pression sur les salaires favorable aux employeurs). Pour le philosophe André Gorz, un revenu trop bas est équivalent à une « subvention aux employeurs » et “ le « revenu social de base doit (…) permettre de refuser le travail et les conditions de travail « indignes » et il doit se situer dans un environnement social qui permette à chacun d’arbitrer en permanence entre la valeur d’usage de son temps et sa valeur d’échange ». (p 137 de Misères du présent, Richesse du possible, 1997). Le RMU permet ainsi de rétablir un rapport de force juste avec le patronat, ce que les syndicats n’arrivent plus à faire.
La proposition de l’économiste Denis Clerc (fondateur d’Alternatives économiques) est également intéressante : un revenu mensuel minimal garanti à tous ceux qui n’ont pas de revenus (même les jeunes de moins de 25 ans) de 700 euros; et le versement d’un complément pour atteindre 1500 euros, pour ceux qui gagnent des revenus par ailleurs ( salaires, prestations familiales, retraites…). Ce revenu permettrait aux 10% les plus pauvres de la population de disposer de 250 euros par mois en plus; les 10% suivants de 200 euros…Sa mise ne place coûterait une trentaine de Milliards d’euros qui pourraient être financés par l’augmentation fiscale sur le cinquième de la population le plus aisé. Bien qu’elle ne permette pas le “renversement de valeurs” radical que permet le caractère universel du RMU proposé par Mylondo, cette proposition permet au moins plus d’équité.
Et pour casser le mythe, la peur bleue selon laquelle si on laissait tout d’un coup le choix aux gens de travailler ou pas, ils ne feraient plus rien du tout, voici un lien vers un documentaire très intéressant réalisé sur le RMU:
Il montre notamment qu’une majorité de gens disent qu’ils continueraient à travailler même s’ils recevaient un Revenu de base, alors que 80% s’imaginent que les autres arrêteraient de travailler – peut-être même, happés par la pente de la grosse fainéantise, finiraient par fusionner avec leur canapé !
La proposition du RMU est vigoureusement optimiste: s’ils se sentent bien, qu’ils ne sont pas poussés à se refermer sur eux-mêmes par toutes les frustrations que notre société néo-libérale actuelle génère (injonctions à être et paraître dans la société de consommation, à s’insérer coûte que coûte sur un marché du travail, même en perdant sa dignité…), les gens ont plutôt tendance, pour leur propre bonheur même, à être créatifs et à vouloir se lier pour construire ensemble. L’atmosphère de solidarité et l’invitation enthousiaste à « prendre soin ensemble » (de notre Terre, du lien social et intergénérationnel, de l’avenir de nos enfants dans un monde vivable…) devraient communiquer du désir de participer autour de ces nouvelles valeurs alternatives à notre monde actuel – qui, lui, ne fait qu’encourager la pente de la désintégration, de laisser-aller, de l’irresponsabilité…
Les initiatives concrètes pour ralentir collectivement
Le mouvement des « Cittaslow » ou Villes lentes est né en 1999 au Nord de l’Italie. S’inspirant du mouvement « Slow Food », qui invite à manger sain et plus lentement en privilégiant la qualité plutôt la « malbouffe », les Villes lentes veulent favoriser l’appropriation de la ville par ses habitants en sortant de la frénésie et du gigantisme. Elles laissent par ailleurs plus d’espaces de respiration pour les usagers de la ville. Voici quelques unes des principales recommandations du Manifeste des Villes lentes : limiter le nombre d’habitants en fonction des capacités du « bassin de vie » et pour garder un espace de communication sociale à taille humaine (au maximum 60 000 habitants) ; réduire les consommations énergétiques et valoriser les technologies écologiques ; étendre les espaces verts et de loisirs ; favoriser les transports en commun et non polluants, tout en multipliant les zones piétonnes ; développer des services de proximité et des structures de démocratie participative. Le mouvement des Villes lentes forme actuellement un réseau international de près de 140 villes dans 21 pays. Segonzac, petite ville de 2 300 habitants en Charente, est la première ville française à avoir sauté le pas en 2010, en prévoyant entre autres l’ouverture d’un parc public, le retour du petit commerce, la réhabilitation d’un réseau de ruelles piétonnes et cyclables, la structuration d’un marché de producteurs locaux, la création de jardins partagés et la transformation de la station d’épuration en bassins filtrants naturels.
D’autres initiatives citoyennes nous invitent à ralentir, telles que la « Grande Pause » lancée dans l’esprit de l’An 01 (« On arrête tout, on réfléchit et c’est pas triste ») par, entre autres, Patrick Viveret… que l’on retrouve dans le réseau pour les « nouvelles richesses » avec son rapport phare pour ce champ de réflexion « Reconsidérer la richesse ».
Alice Médigue
http://jalonsaujardin.wordpress.com
 Voir la page de mon blog: les « ressources pour ralentir »

Réponses

  1. Long billet … mais intéressant.
    nous sommes arrivés à un point de notre évolution où il faut distinguer la notion de contribution à la société (qui est presque aussi nécessaire que manger boire et dormir) et la notion de « travail ».
    nous sommes entrain de découvrir que le vivre ensemble se divise en 5 espace : le marchand et le régalien soumis aux règles du « travail / emploi » tel que nous le connaissons. les autres espaces (associatif, pré-marchand et familial) s’inscrivent dans un cycle de production plus lent et néanmoins indispensable.
    Ainsi, la vie socioéconomique est composée de 2 sphères : le « haut » qui s’occupe du quotidien et le « bas » qui s’occupe de façonner le terreau où se développent les sous-jacents (la culture, les savoirs, les talents, les idées nouvelles …).
    Notre paradigme actuel a sur développé la gouvernance du haut. Il faut mettre en place un nouveau paradigme qui irrigue en moyens sociaux et économiques le bas.
    Ceci amène à repenser le système démocratique et ses institutions.
    Pour cela, il faut lancer des expérimentations en vrai grandeur (http://www.vitacogita.fr/fr/ebook/2800000000790/mieux-que-la-r%C3%A9industrialisation ).
    Le revenu de base devient une évidence. Nous y sommes déjà : 38 % des allemands vivent d’un revenu de réversion ! Alors, autant prendre cette donnée comme une réalité et simplifions la tringlerie qui distribue et contrôle ces usines à gaz !
    Si nous ne le faisons pas, nous serons définitivement submergés par les pays « émergeants » qui s’inventent la démocratie durable du 21ème siècle … 
    Par Geneviève Bouché (@Bouche2001) le 28 février 2012
  2. L’expression « un revenu d’existence parce qu’on existe et non pour exister » est la phrase titre de l’AIRE (Association pour l’instauration d’un revenu d’existence) ( revenudexistence.org) créé en 1984 par Yoland Bresson et Henri Guitton et non attribuable à James Meade qui lui parle de dividende social.