samedi 24 novembre 2012

Die 26150 : Présentation du Nucléaire et sa sortie avant la Chaîne humaine de ce Dimanche ( 1ère Partie)

Sortir des Energies fossiles est possible, en douceur…

Réunion importante ce samedi 25 novembre, puisque quelques 60 personnes avaient répondu à ce rendez-vous préparatoire à la Chaîne Humaine de dimanche 25 novembre. Après l’introduction de Mireille Verdet et Marc Isoard, de l’ Association Dioises de Transition Energétique,  Mr Philippe Méjean présentait le ‘Scénario NégaWatt’ (1) de sortie du Nucléaire et ‘l’Histoire du Nucléaire’ en France depuis 1945 (2).
Un futur énergétique durable selon négaWatt.
Le 24 novembre, l’association Dioise de Transition Energétique du Dioisa demandé à Philippe Méjean de présenter le scénario négaWatt,  scénario énergétique à l’horizon 2050. De quoi démontrer, selon ses défenseurs, la possibilité de sortir du nucléaire d’ici une vingtaine d’années.
Dérèglement climatique, épuisement des gisements de pétrole et de gaz, risque nucléaire… Pour répondre à l’urgence, négaWatt, une association d’ingénieurs, travaille depuis 2001 à l’élaboration d’un scénario énergétique alternatif. Objectif : apporter la preuve qu’il est possible de sortir du nucléaire, tout en respectant l’impératif d’une forte réduction des émissions de gaz à effet de serre. Révisé en 2006, ce scénario vient d’être refondu. Conclusion des experts : une baisse d’environ 65% de la demande énergétique est possible d’ici à 2050. Comment ? En combinant sobriété énergétique, efficacité énergétique et développement des énergies renouvelables.
À quoi sert le nucléaire ?
Le nucléaire sert à produire de l’électricité (80% de notre consommation électrique en France provient du nucléaire) mais l’électricité ne couvre que 22% de nos besoins énergétiques. Par ailleurs, seuls 33% de l’uranium consommé par l’industrie nucléaire sert in fine à produire de l’électricité.
« On parle sans cesse de production d’énergie, argumente Philippe Mejean. Mais jamais de la demande. Or, en prenant comme point de départ l’ensemble de la consommation énergétique française, puis en reconstituant à partir d’elle l’ensemble du réseau énergétique, jusqu’aux énergies primaires, on constate qu’il existe un gigantesque gisement dans la maîtrise de l’énergie, ce que nous appelons de manière imagée des ‘’négawatts’’. »
Comment agir ?
Selon l’association, le plus important filon de négawatts se trouve dans le secteur du bâtiment qui engouffre à lui seul 40% de nos besoins énergétiques. Ainsi, en 2050, on pourrait économiser 600 térawattheures (TWh) par rapport à la consommation actuelle, ce qui correspondrait à une baisse de 63% de la consommation. De même, les transports représenteraient un gisement de 400 TWh, soit une diminution de 67% de la consommation dans le secteur. Puis l’industrie, 200 TWh, soit 50% d’économie.
Pour tenir ces objectifs, deux impératifs : une révision complète de nos modes de vie et la mise en œuvre de politiques volontaristes. Ainsi, dans le bâtiment, il s’agira, côté sobriété, de stabiliser le nombre d’habitants par foyer (en baisse depuis cinquante ans selon l’Insee) et de réduire la surface moyenne par habitant. De quoi économiser 3 millions de logements d’ici à 2050. Et pour l’efficacité, de travailler sur l’isolation et l’optimisation des modes de chauffage. De même, l’objectif de réduction de la consommation dans les transports résultera d’une remise en cause de l’étalement urbain et du développement des transports en commun.
Côté énergies primaires, le scénario négaWatt table sur un décollage des énergies renouvelables. En particulier de la biomasse, avec comme première ressource le bois ; mais également du méthane issu, par exemple, des déjections d’élevage ou par synthèse chimique à partir du dioxyde de carbone émis par l’industrie. Sans oublier l’éolien, l’hydroélectrique et le photovoltaïque.
De quoi non seulement sortir du nucléaire en 2033, selon les auteurs de ce scénario. Mais également de réduire à peau de chagrin notre consommation de pétrole et de gaz. Et, ce faisant, mettre la France en cohérence avec l’objectif d’un réchauffement planétaire n’excédant pas 2°C. Soit le seuil critique à ne pas dépasser selon les experts climatiques.
Objectif crédible.
Pour Philippe Mejean, « notre scénario n’est fondé que sur des technologies existantes, nous sommes donc confiants sur ses aspects technologiques ». L’association négaWatt a  un chiffrage financier précis: « Nous estimons qu’en trente ans, il est possible d’économiser 750 milliards d’euros sur notre facture d’énergies fossiles. Sans compter le gisement d’emplois potentiels dans le solaire, l’éolien ou, bien sûr, le bâtiment. » Et d’ajouter : « Ne rien faire n’est pas une solution. » Pour autant, Thierry Salomon concède : « Il existe des incertitudes sur l’inertie du modèle actuel, et le type de gouvernance ou les systèmes de prise de décisions à mettre en place pour parvenir à nos objectifs. »
Le scénario négaWatt.
A la différence des réponses technologiques classiques et souvent binaires (pour ou contre le nucléaire par exemple), le scénario négaWatt propose une approche par la demande plutôt que par l'offre, à travers le concept de services énergétiques.
Il ne peut pas mieux tomber, le nouveau scénario négaWatt. Pour Philippe Mejean, le contexte post-Fukushima est favorable : ''Après cet accident, le tabou de la sortie du nucléaire en France a été levé. Et sur ces entrefaites, l'Allemagne a décidé de sortir totalement du nucléaire. Du coup, l'interrogation sur la faisabilité devient caduque : non seulement le scénario négaWatt 2011 est faisable, mais on a beaucoup plus de marge de manœuvre ''. Et si la sortie du nucléaire était une bonne nouvelle pour la France ? Car à travers le scénario négaWatt, c'est une nouvelle perspective sociétale qui s'exprime. En témoigne l'affluence étonnante qui entoure sa présentation publique à Die  ce 24 novembre 2012. Une rencontre qui dépasse les cercles de spécialistes et d'experts. Le scénario négaWatt, c'est un projet de société.
Remettre la question énergétique dans le bon sens.
Fondée en 2001, l'association négaWatt milite pour ''remettre la question énergétique dans le bon sens en partant des usages et non des ressources : c'est de nous chauffer, de nous éclairer ou de nous déplacer dont nous avons besoin, et non de bois, d'uranium ou de pétrole''. En incarnant l'énergie dans les besoins humains, négaWatt montre que les choix énergétiques ne sont pas que technologiques ou matériels : ils sont porteurs de valeurs.
La trilogie sobriété-efficacité-renouvelables fournit une triple réponse à la question de l'avenir énergétique. Elle présente l'originalité d'être au croisement de l'éthique et de la technologie. La sobriété interroge et les besoins et agit sur les comportements, à travers des mesures simples comme la réduction de la vitesse sur les routes ou le recours au co-voiturage. Elle consiste à privilégier les usages les plus utiles et restreindre les plus extravagants. L'efficacité consiste à agir par les choix techniques afin d'optimiser la quantité d'énergie nécessaire à satisfaire un service énergétique donné. Le recours aux énergies renouvelables, enfin, vise à augmenter la part de services énergétiques alimentés par les énergies les moins polluantes et les plus localisées.
Ingrédients de la transition énergétique.
Il y a d'autant plus urgence à opter pour une transition que les choix énergétiques relèvent du temps long : les infrastructures d'aujourd'hui pèseront longtemps sur les générations futures. Le CO2 libéré par la combustion des énergies fossiles pèsera sur le climat de demain, les déchets nucléaires et le démantèlement des centrales auront des coûts à long terme, et chaque goutte de pétrole consommée aujourd'hui nous rapproche de la pénurie. Le scénario négaWatt s'affirme soucieux de préserver le long terme. Fruit d'un travail collectif de plus d'une quinzaine d'experts, il réactualise le scénario antérieur (2006), qui avait inspiré certaines mesures du Grenelle, et porte sur l'horizon 2050. Il s'agit d'une approche multidimensionnelle, qui ne se résume pas à la lutte contre le changement climatique. Il y est aussi question de contraintes sur l'eau et les matières premières, d'usage des sols et de la biomasse pour l'alimentation et l'énergie.
Le modèle se fonde sur la prise en compte des besoins de services énergétiques dans trois secteurs principaux : la chaleur (chauffage des bâtiments, eau chaude sanitaire, cuisson des aliments, chaleur utilisée dans les process industriels) ; la mobilité (l'ensemble des déplacements des personnes, des matières premières et des biens) ; l'électricité spécifique (éclairage, électroménager, informatique, bureautique et moteurs électriques). Le scénario négaWatt analyse secteur par secteur les gains attendus de l'application d'une démarche de sobriété et d'efficacité. Les économies les plus importantes sont trouvées dans le bâtiment (résidentiel + tertiaire) : avec plus de 600 TWh d'économie en 2050 par rapport à une évolution tendancielle, il connaît une réduction de 63 % par rapport à 2010 (année de référence du scénario nW). Et ce malgré le contexte démographique projeté par l'INSEE et que le scénario nW prend en compte : 72,3 millions d'habitants en France en 2050, soit 7 millions de personnes supplémentaires dont les besoins seront à satisfaire.
2,2 fois moins d'énergie en 2050.
Dans les transports, le scénario nW prévoit une évolution des besoins de mobilité sous l'effet des politiques d'aménagement du territoire et de nouvelles pratiques sociales : généralisation des transports doux et des transports en commun, densification des espaces urbains, revitalisation des campagnes, télétravail, covoiturage, le scénario prévoit un gain d'environ 25% de kilomètres parcourus par personne en une année. Une meilleure efficacité des moteurs permet d'en diminuer la consommation unitaire de 55% d'ici à 2050. Quant au véhicule électrique, sa généralisation poserait d'importants problèmes de réseau électrique et de matières premières, il faut donc le réserver aux trajets courts en milieu urbain.
Dans le secteur industriel, le scénario prévoit une baisse de 10 % à 70 % sur les besoins en matériaux grâce à l'instauration de principes de « réparabilité » ou « recyclabilité » et intègre un gain moyen de 35% pour les moteurs électriques. Les énergies renouvelables dans ce secteur couvriront 30 % des besoins de chaleur basse température d'ici à 2050. L'agroalimentaire ne sera pas en reste et laissera plus de place à la biomasse et moins à la production de viande et d'élevage, dans un souci de rééquilibrage des surfaces disponibles et de souveraineté alimentaire.
Nouvelle gouvernance.
Au final, les Français ne consommeront pas moins, mais mieux, soulignent les promoteurs du scénario négaWatt 2011. Et les gains en énergie seront considérables : 54 % sur la chaleur, 59 % sur la mobilité, et 40% sur l'électricité spécifique. Il faudra donc fournir 2,2 fois moins d'énergie en 2050 que dans un scénario tendanciel. En conséquence, les besoins restants seront couverts à 90 % par les énergies renouvelables. Priorité à l'éolien avec une multiplication par 3,5 de la puissance installée d'ici à 2020 puis encore par 2 d'ici 2050 avec 17 500 machines installées en offshore en priorité. Quant au photovoltaïque, il pourra atteindre à terme 90 TWh par an, si une politique volontariste est instaurée. Au total, l'ensemble des filières renouvelables pourront fournir jusqu'à 990 TWh en 2050, sur un total de 1100 TWh de besoins en énergies primaires, soit 90 % des besoins. Infrastructures et réseaux devront être adaptés à cette grande mutation, avec des procédés de stockage innovants, comme la méthanation par électrolyse d'hydrogène combiné à du CO2, une nouveauté de ce scénario. Le tout permettra de se passer de nucléaire : le scénario prévoit l'arrêt du dernier réacteur du parc en 2033. Le recours temporaire à des centrales au gaz est proposé comme solution de transition, dans la limite de 70 TWh par an.
Pour changer la donne, la gouvernance de l'énergie devra aussi évoluer, souligne en conclusion le document de présentation. Principe constitutionnel d'accès à une source d'énergie sûre et à un prix acceptable, loi d'orientation pour la transition énergétique et Haute Autorité indépendante de l'énergie, du climat et de l'environnement forment les trois piliers de cette nouvelle gouvernance. Trois chantiers seront alors prioritaires : rendre le pouvoir aux territoires pour une gestion locale et citoyenne de l'énergie, faire de la transition énergétique l'affaire de tous, et repenser l'urbanisme, à la recherche d'un ''mieux vivre ensemble''. Environ 60 personnes écoutaient cette intervention à la Salle municipale Joseph Reynaud de Die, la vieille de la Chaîne Humaine de sortie du Nucléaire et pour les Alternatives énergétiques.
Claude Veyret

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